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7 mars 2013  Archives des actualités

Le 8 mars

’Journée des femmes’ et ’journée de femme’

Le 8 mars, nous célébrons partout dans le monde la « journée des femmes » … une initiative de sensibilisation importante, mais hélas, pour beaucoup de femmes paysannes d’Afrique des Grands Lacs, une journée qui ne différera pas beaucoup des 364 autres journées de l’année…

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Ainsi Ménédore, six enfants, originaire de Mugamba au Burundi : à quoi ressemblera sa « journée de la femme » ?

Comme tous les jours elle se lèvera à 5.00h du matin, elle nettoiera la cour, activera le feu et partira chercher de l’eau à la fontaine distante d’environ 4 kilomètres. A 6.30h elle préparera les repas pour toute la famille avant d’aller travailler aux champs. De retour vers 15.00h, elle devra décortiquer le riz, piler le manioc, puis elle ira chercher du bois de chauffage, entretiendra la case. Durant toute la journée elle allaitera bien-sûr son petit dernier, tout en devant sans doute supporter la mauvaise humeur de son mari. Vers 23.00h, elle pourra enfin aller se coucher et dormir un peu, si tout va bien….
Aujourd’hui, dans la majorité des pays africains, l’agriculture paysanne et donc la subsistance de la famille reposent sur les épaules des femmes. 70% des paysans sont des paysannes, lesquelles composent aussi la majorité des personnes souffrant de la faim dans le monde. Longtemps, les politiques agricoles n’ont pas tenu compte de cette féminisation.
Lutter contre la faim et la malnutrition passe donc impérativement par l’amélioration du quotidien de Ménédore et de tant d’autres.
Pour Olivier De Schutter, Rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l’alimentation qui présentait ce lundi 3 mars devant l’Onu un rapport sur le rôle joué par les femmes dans la lutte contre la faim, « il faut trouver un équilibre entre trois impératifs : reconnaître les contraintes qui pèsent sur les femmes, soulager ces femmes dans leurs tâches quotidiennes en créant des services publics adéquats dans les campagnes, et redistribuer les rôles […].
Pour lutter durablement contre la malnutrition, il faut donner aux femmes un meilleur accès à l’éducation, développer l’emploi dans les zones rurales en dehors de l’agriculture, et mettre en place des moyens de communication.
Le fait est que jusqu’à présent, on a beaucoup plus investi dans les villes que dans les campagnes, et beaucoup de gouvernements qui ont voulu soutenir l’agriculture l’ont fait avec des programmes très bling-bling sans prendre en compte la dimension féminine. »
 [1]

Une plus juste répartition des rôles

Mais comment “contraindre” les hommes à redistribuer les rôles ?
« La répartition des tâches est basée sur des représentations culturelles et sociales très profondément ancrées. Il faut donc agir à deux niveaux : au sein du ménage, il faut sensibiliser les maris, et les initier au changement de rôle à travers des programmes ciblés […] ; ensuite il faut agir sur les systèmes politiques afin de garantir une meilleure représentation des femmes. Tant que celle-ci seront sous-représentées dans les assemblées villageoises ou les parlements régionaux, peu de progrès seront observés parce que les politiques agricoles et sociales seront encore adoptées en faveur des hommes. C’est un défi de taille : en 2010 les femmes occupaient encore moins de 10 % des sièges parlementaires dans les 58 pays du monde où elles sont les moins représentées ».

Une formation comme alternative

Mais souvent les femmes n’ont pas elles-mêmes conscience de la subordination dont elles sont victimes. L’objectif n’est donc pas de choisir à leur place, mais de leur donner la possibilité de choisir en leur offrant des alternatives.
Et une source d’alternatives, c’est la formation !
Dans le cadre d’un programme de soutien à l’agriculture paysanne mené dans la province de Bujumbura Rural par l’OAP [2] et appuyé par Entraide et Fraternité, Ménédore a pu se former à des techniques agro-écologiques qui l’ont aidée à augmenter sa production et ses revenus.
Elle a appris à alterner ses cultures de façon plus efficace ; à utiliser des semences mieux adaptées à son sol et donc plus résistantes aux maladies ; à fertiliser sa parcelle grâce à des engrais organiques ; à protéger son champs de l’érosion par des plantations de bananiers et de plantes fourragères le long des courbes de niveaux… et ses rendements ont considérablement augmenté !
« Avant de suivre les formations, je produisais peu » déclare-t-elle, « maintenant, je fais des récoltes plus importantes et je peux vendre les surplus sur le marché. Grâce à ces nouveaux revenus j’ai eu de quoi payer la scolarité de mes enfants. Mais ce dont je suis la plus fière, c’est que j’ai réussi à convaincre mes voisines de faire comme moi. »
Dans les collines du Burundi on ne célébrera peut-être pas la journée de la femme en grande pompe, mais un vent de changement s’est levé : grâce à de nouvelles techniques agro-écologiques la faim commence à être combattue efficacement et des milliers de femmes voient leur quotidien, leurs « journées de femmes », s’améliorer tout doucement…

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Ménédore


[2Organisation d’appui à l’Auto-Promotion



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